Méconnu et mal pris en compte dans les traitements contre l’infertilité, le microbiote intestinal est pourtant très important pour soutenir votre fertilité. Découvrez quels facteurs le déséquilibrent et les conseils de Marie-Liesse Goutte, infirmière diplômée d’état formée en phytothérapie et aromathérapie spécialisée en accompagnement de l’infertilité, pour l’enrichir et le protéger afin d’augmenter vos chances de concevoir un bébé.
Et si l’avenir de la fertilité humaine se jouait au niveau du microbiote ?
C’est une question qui est de plus en plus considérée par les chercheurs dans ce domaine.
Il y a d’ailleurs aujourd’hui 100 fois plus d’études sur le sujet qu’il y a 10 ans. (1)
On retrouve des liens avec les principales causes d’infertilité comme le SOPK, l’endométriose, les dérèglements hormonaux et même les grossesses pathologiques (2).
Il me paraît donc intéressant d’essayer de comprendre ce qu’est un microbiote.
Quel est son rôle et son impact sur la fertilité ?
Comment savoir si votre microbiote est de bonne qualité ? Et comment le nourrir ou le réensemencer ?
Le Docteur Faggianelli est, en France, une figure d’avant-garde dans ce domaine et c’est, en partie, grâce à ses écrits que cet article a pu voir le jour.
Vous pouvez aussi creuser la question en vous abonnant à la Revue des microbiotes, mensuel passionnant et qui permet de suivre l’actualité des recherches.
Qu’est-ce qu’un microbiote ?
On parle de façon plus juste de microbioteS, qui sont des ensembles de bactéries et de micro-organismes vivants sur les muqueuses de notre corps.
Chaque microbiote est composé de microbiomes.
On connaît par exemple le microbiote digestif qui pèse entre 1 et 5kg.
Mais il y a autant de microbiotes que de muqueuses dans le corps humain. Ce sont les écosystèmes dont dépendent notre survie.
Ce microbiote se met en place, principalement, in utéro et dans les trois premières années de vie.
Des études ont d’ailleurs fait le lien entre certaines prises de substances pendant la grossesse et les répercussions sur le microbiote de l’enfant. (3)
On peut quantifier les microbiotes par leur population bactérienne.
Par exemple, on évalue la flore vaginale grâce au score du Nugent qui va comptabiliser les différents types de micro-organismes présents.
Cela donne une idée plus précise pour savoir s’il est sain ou déséquilibré. (4)

Quels microbiotes ont un impact sur la fertilité ?
Ces microbiotes permettent de protéger les surfaces qu’ils recouvrent mais leurs rôles sont plus complexes et ils ont un impact direct sur la santé humaine. Ils jouent un rôle dans le système immunitaire, la protection de l’organisme, la santé mentale, la digestion, et la gestion du stress.
On parlera ici, principalement, des microbiotes qui vont impacter la fertilité : le microbiote vaginal bien-sûr, le microbiote endométrial qui est essentiel pour une grossesse, le microbiote cervical, le microbiote séminal encore peu investigué et le microbiote digestif.
Ce dernier est le plus connu : il est le garant d’une bonne assimilation, d’un système digestif non inflammé et efficace.
Je me permets de m’arrêter quelques instants sur un microbiote particulier : l’œstrobolome, qui est particulièrement interessant dans la gestion de la fertilité.
Ce microbiote permet de métaboliser les oestrogènes dans le colon.
Si on reprend le schéma d’élimination des œstrogènes, on va avoir des œstrogènes circulants qui une fois usagés arrivent au foie. Celui-ci va les désactiver, pour permettre leur élimination par voie digestive.
L’œstrobolome récupère ces œstrogènes désactivés et choisit de les réactiver ou non pour permettre la fabrication d’un stock d’œstrogènes au niveau digestif.
Vous comprenez bien que si ces microbiotes et particulièrement l’œstrobolome sont perturbés il va y avoir des impacts directs sur la fertilité.
Un œstrobolome trop actif provoque une hyperœstrogénie importante avec des risques de pathologies telles que l’endométriose, les fibromes ou les cancers hormono-dépendants, etc. Mais s’il est sous-activé : les œstrogènes sont trop éliminés et cela favorise la montée des androgènes dans le foie. Ce qui fera le lit des pathologies comme le SOPK.
Bref le microbiote est un mécanisme de précision dont vous devez prendre soin.
Une dysbiose peut être la cause d’une infertilité
En France, un couple sur 5 connaît des problèmes de fertilité. Les causes sont majoritairement pathologiques mais il reste un pourcentage de ce qu’on appelle « infertilité inexpliquée ».
Or l’étude du microbiote permet d’apporter des pistes d’investigation supplémentaires.
Dans ma pratique, je constate majoritairement que lorsqu’il y a des dysbioses digestives et/ou vaginales, il y a des difficultés de conception.
Le biais majoritaire est que pour le moment il y a peu de moyens pour qualifier les autres microbiotes.
Certains tests commencent à travailler sur les dysbioses (perturbation du microbiote) endométriales, en revanche on connait déjà le fait qu’il y ait un continuum entre le microbiote vaginal, le cervical et endométrial. On peut donc déduire qu’une flore vaginale perturbée risque de favoriser une flore endométriale déséquilibrée.
Mais cela fonctionne aussi du côté masculin. Après plusieurs années à penser que le sperme était
microbiologiquement stérile, on sait maintenant qu’un microbiote séminal perturbé va altérer la qualité du sperme. De même le microbiote vaginal va modifier le microbiote séminal.
Bref il y a de quoi se perdre. Mais la recherche des dysbioses génitales, chez la femme et chez l’homme, apparaît comme une exploration indispensable à la prise en charge des cas d’infertilités actuels.
Je ne peux que vous recommander la lecture de cette revue (4) , qui explore aussi les impacts des différentes dysbioses sur les résultats d’implantation en PMA. Cela semble promettre des voies de recherches passionnantes.
Mes microbiotes sont-ils sains ?
Quelques signes qui peuvent nous alerter sur une possible dysbiose :
✅ Pour le microbiote digestif : des ballonnements, des gaz, une inflammation à bas-bruit, un ventre qui gonfle après les repas, un transit perturbé (constipation ou diarrhées), des douleurs.
✅ Pour l’œstrobolome : des pathologies systémiques à impact gynécologique : SOPK, endométriose etc… mais aussi cycles perturbés, avec présence de syndrome pré-menstruel par exemple.
✅ Pour le microbiote génital : la présence de candidose vaginale, ou tout dérèglement de la flore, mais aussi des douleurs au niveau vaginal ou utérin, des écoulements, des sécrétions anormales ou trop présentes, et à l’inverse une trop grande sécheresse vaginale. Les douleurs utérines peuvent aussi signer des endométrites, ainsi que des saignements post-règles.
✅ Pour les dysbioses au niveau du col de l’utérus, certaines études les mettent en lien de cause à effet les accouchements prématurés. (5, 6)
Quelles peuvent être les causes d’une dysbiose ?
La prise d’antibiotiques est une des premières causes de dysbioses, les perturbateurs endocriniens et les traitements hormonaux auront un impact sur tous nos microbiotes aussi bien digestifs, que génitaux.
Une alimentation déséquilibrée, un stress oxydatif au quotidien vont modifier la population des microbiotes. Certaines habitudes du quotidien, qu’on verra ensuite et faciles à modifier vont avoir une incidence directe sur nos micro-organismes.
Comment prendre soin de vos microbiotes pour soutenir votre fertilité ?
Je vais commencer par vous donner quelques conseils d’hygiène de vie quotidienne à mettre en place.
Pour la sphère digestive, l’alimentation prend toute son importance.
Cela va de la mastication lente au choix des produits (attention à l’excès de sucre et aux plats préparés), avec un apport de fibres sans excès (elles vont nourrir les bactéries) : noix, légumes, légumineuses, sans oublier le choix d’ustensiles de cuisine sans perturbateurs endocriniens.
Vous devrez aussi veiller à avoir un bon apport en prébiotiques
Une équipe de chercheurs japonais a mis en évidence le rôle déterminant des prébiotiques dans la fertilité féminine. (7)
L’étude, menée sur 36 femmes, a consisté à administrer des prébiotiques à celles qui souffraient d’infertilité.
Les résultats ont montré que cette supplémentation en prébiotiques augmentait de 22 % leurs chances de concevoir un enfant (taux de grossesse à 58 % chez les femmes recevant des prébiotiques contre 36 % pour celles ayant recours aux techniques habituelles d’assistance médicale à la procréation).
Les auteurs de l’étude expliquent ce phénomène par l’impact majeur de l’immunité sur l’endomètre (la paroi interne de l’utérus qui accueille l’embryon) et les « adaptations hormonales », immunité qui est elle-même étroitement liée à l’état de notre microbiote intestinal.
Ail, poireau, oignon, asperges, banane, chicorée… font partie des aliments d’origine végétale qui renferment des prébiotiques comme les fructo-oligosaccharides et l’inuline.
La gestion du stress est indispensable car un stress trop important déréguler le PH de l’estomac ce qui favorise une dysbiose intestinale.
Pour la sphère gynécologique, l’hygiène intime est primordiale : attention au savonnage intensif qui agresse la flore vaginale. Les sous-vêtements en coton, plus respirants sont aussi à favoriser.
Quelques remèdes naturels pour prendre soin de vos microbiotes ?
Pour soutenir vos différents microbiotes, je vous conseille deux bourgeons que j’apprécie énormément à utiliser en cure de 3 semaines :
Le bourgeon de romarin qui va travailler sur le foie, la muqueuse intestinale, l’inflammation et l’oxydation.
Et le bourgeon de noyer qui lui travaille directement sur le microbiote.
Posologie : 15 gouttes par jour du lundi au vendredi. Prenez le romarin le matin et le noyer le soir car celui-ci se prend loin des autres traitements.
Côté infusion, les feuilles d’artichaut aident à rétablir une flore intestinale malmenée par le stress ou les antibiotiques : 2 cuillères de feuilles sèches pour 2 tasses après chaque repas.
Les racines de Chicorée, contiennent aussi la même molécule : l’inuline qui est un prébiotique. On conseille d’en faire une décoction de 25g pour 50 cl d’eau à faire bouillir pendant 5 minutes puis une infusion de 5 minutes. Cela peut servir de cure de détoxification au printemps, notamment pour des adolescents ayant de l’acné. La cure est de 21 jours, 2-3 tasses par jour.
Pour la gestion du stress c’est le bourgeon de figuier qui prend tout son sens car il va travailler sur le stress en lui-même mais aussi sur le Ph de l’estomac. Posologie : 15 gouttes par jour du lundi au vendredi pendant 3 semaines.
En soutien du système immunitaire via la régénération des muqueuses digestives : c’est le bourgeon d’églantier qui est intéressant. La posologie est la même que pour le bourgeon de figuier.
Pour l’œstrobolome, favorisez une détoxification hépatique avec le chardon-marie et une belle flore avec le cumin et le fenugrec.
Dans les cas de dysbiose, la chlorophylle magnésienne est une piste intéressante à creuser, elle est plus facile d’utilisation que la berbérine qui a plus d’effets secondaires.

Quels probiotiques choisir pour soutenir votre fertilité ?
Prenons quelques instants pour comprendre le fonctionnement des probiotiques, des prébiotiques et des post-biotiques.
Pour faire simple, les probiotiques sont des bactéries qui vont coloniser votre microbiote, les prébiotiques vont les nourrir et les postbiotiques sont les petits à-côtés qui vont permettre que tout le monde fonctionne bien !
Il faut bien comprendre que les probiotiques pris en plus, vont avoir une durée d’action très limitée dans le temps sur notre microbiote, nos propres microbiotes doivent prendre le relais ensuite.
Il est donc essentiel d’avoir de bonnes habitudes au quotidien et de ne pas tout attendre d’une cure de probiotiques.
Des probiotiques pour la fertilité féminine
Pour la femme, les probiotiques qui vont soutenir la sphère gynécologique sont :
- L. crispatus E (notamment interessant pour les dysbioses cervicales)
- L. gasseri E (parfait en cas endométriose)
- Lacticaseibacillus rhamnosus E
- Lactiplantibacillus plantarum E
à prendre soit en souche unique, soit en association de souches.
Des probiotiques pour la fertilité masculine
Pour soutenir la fertilité des hommes, une étude prometteuse menée par l’université d’Aalborg au Danemark (7) a identifié les bienfaits de la souche Lactobacillus rhamnosus PB01 pour restaurer la qualité du sperme et réguler les hormones des hommes souffrant d’infertilité.
Chez les hommes souffrant d’asthénozoospermie (un trouble qui réduit ou en annule la mobilité des spermatozoïdes), une étude (8) a montré que ceux qui se supplémentaient en Lactobacillum et Bifidobacterium pendant 6 semaines augmentaient la motilité de leurs spermatozoïdes et diminuaient la fragmentation de leur ADN spermatique.
Pour bien choisir vos probiotiques, retenez l’importance de prendre un nombre suffisamment important de souches différentes, les recommandations sont de 10 puissance 9 ou 10, de privilégier les gélules gastro-résistantes, et de les accompagner de sources de prébiotiques.
Privilégiez les grandes marques françaises qui sont spécialisées dans les probiotiques et ont fait de nombreuses études.
J’espère que cette plongée au cœur du microbiote vous aura passionné autant que moi.
C’est une véritable avancée dans l’accompagnement des couples en désir de concevoir un bébé et ça commence dans nos habitudes du quotidien, ce qui la rend bien plus facile à mettre en place.
Et vous ? Est-ce que vous connaissiez le rôle de vos microbiotes sur votre fertilité ? Est-ce qu’on vous a déjà conseillé une supplémentation en pré et probiotiques ? Partagez votre expérience avec nous dans les commentaires ci-dessous !
Marie-Liesse Goutte
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Sources
(1) López-Moreno A, Aguilera M. Probiotics Dietary Supplementation for Modulating Endocrine and Fertility Microbiota Dysbiosis. Nutrients. 2020 Mar 13;12(3):757. doi: 10.3390/nu12030757. PMID: 32182980; PMCID: PMC7146451.
(2) Romero R, Hassan SS, Gajer P, et al. The composition and stability of the vaginal microbiota of normal pregnant women is different from that of non-pregnant women. Microbiome 2014.
(2) file:///C:/Users/marie/Downloads/REVUE-MICROBIOTE-3_fr.pdf
(3) https://microbiologie-clinique.com/score-Nugent.html
(4) file:///C:/Users/marie/Downloads/La-revue-Des-Microbiotes-N%C2%B022—Mars-2022.pdf
(5) Hackney DN, Olson-Chen C, Thornburg LL. What do we know about the natural outcomes of preterm labour? A systematic review and meta-analysis of women without tocolysis in preterm labour. Paediatr Perinat Epidemiol 2013
(6) Payne MS, Bayatibojakhi S. Exploring preterm birth as a polymicrobial disease: an overview of the uterine microbiome. Front Immunol 2014 ; 5 : 595
(7) Komiya S, Naito Y, Okada H, Matsuo Y, Hirota K, Takagi T, Mizushima K, Inoue R, Abe A, Morimoto Y. Characterizing the gut microbiota in females with infertility and preliminary results of a water-soluble dietary fiber intervention study. J Clin Biochem Nutr. 2020 Jul;67(1):105-111. doi: 10.3164/jcbn.20-53. Epub 2020 Jun 5. PMID: 32801476; PMCID: PMC7417798.
(8) Management of low male fertility potential with probiotics (Lactobacillus rhamnosus PB01): a novel approach in male sub-fertile patients, Aalborg University, 2020.
(9) Valcarce DG, Genovés S, Riesco MF, Martorell P, Herráez MP, Ramón D, Robles V. Probiotic administration improves sperm quality in asthenozoospermic human donors. Benef Microbes. 2017 Apr 26;8(2):193-206. doi: 10.3920/BM2016.0122. Epub 2017 Mar 27. PMID: 28343402.
(10) Attia YA, Abd El Hamid EA, Ismaiel AM, El-Nagar A. The detoxication of nitrate by two antioxidants or a probiotic, and the effects on blood and seminal plasma profiles and reproductive function of New Zealand White rabbit bucks. Animal. 2013 Apr;7(4):591-601. doi: 10.1017/S1751731112002054. Epub 2012 Nov 26. PMID: 23177268.
Salut ; je suis monsieur Alexis Alex-ndasi de la nationalité congolaise (RDC).
Vraiment Je besoin de votre Aide pour avoir un Enfant. Je suis Mariée il y a8 ans. Aidée nous SVP !
Je prends régulièrement des cures de probiotiques mais je ne savais pas du tout ses effets en pré-conception. Merci beaucoup pour cet article super intéressant
C’est un super article, merci beaucoup pour les infos.